Toi, moi, Tituba

RWANDA

TEXTE ELSA DORLIN ET MISE EN SCÈNE DOROTHÉE MUNYANESA

Théâtre du Point du Jour

Mardi 17 octobre – 20h
Mercredi 18 octobre – 21h

Durée 1h

Tarif 2
À partir de 14 ans

Bord de scène le 17 octobre

Tituba, sorcière noire impliquée dans les procès de Salem au XVIIème siècle, est le point de départ de ce nouveau spectacle de Dorothée Munyaneza qui aborde la question de la mémoire et de l’héritage. Cette figure longtemps oubliée est un symbole de résistance à l’oppression en tant que femme noire, que Maryse Condé a exhumé des mémoires avec son livre Moi, Tituba, sorcière… en 1986. Pour lui rendre hommage ainsi qu’à toutes les voix et les corps effacés, tus et meurtris, Dorothée Munyaneza crée un « solo collectif », une archive dansée pour vaincre l’oubli et l’effacement. Sur un texte de la chercheuse en philosophie féministe Elsa Dorlin autour de Tituba, l’artiste évolue entre ombre et lumière, brouillant la frontière entre le présent et l’absent, dans un costume et une scénographie conçue par la plasticienne Sophie Coudert. Elle est accompagnée par les voix distantes d’archives orales, fil de transmission fragile dont le compositeur Khyam Allami restitue la puissance au coeur de nos sociétés.

UN MOT DE DOROTHÉE MUNYANEZA

« Récit-généalogie paru en 1986, Moi, Tituba sorcière… donnait vie, à partir de quelques lignes découvertes dans les minutes d’un procès pour sorcellerie, à Tituba, femme, noire et sorcière, à une époque où il valait mieux n’être aucun. Une œuvre-résistance, celle de Maryse Condé, qui n’a eu de cesse de redonner une voix, une chair, une histoire à ce qui a été effacé, tu et meurtri.

Car tout est là. Comment faire résonner les souffles, les vies et les rêves de ces hommes et ces femmes dont les identités et les existences furent niées et broyées par la traite et le système colonial ?

À travers les mots ? À travers le corps peut-être, puisque je suis danseuse ? A travers la voix qui habite l’espace, les chants qui parlent à ceux qui sont là et ceux qui sont loin ? Comment déplacer mon corps et mon histoire pour rendre audibles, visibles et palpables, des traces de vie éteintes, passées inaperçues, ignorées ou oubliées, comment me relier à ma propre histoire dont ne témoigne nulle trace écrite, à l’exception, peut-être, de quelques « ratures historiques » pour reprendre les mots d’Elsa Dorlin dans les archives administratives coloniales ? Est-il possible de faire lignage, de relier le temps d’une danse, celles et ceux que l’histoire a oublié·e·s avec tant d’application avec nos vies, mais aussi avec celles et ceux qui sont à naître ? »

DE MARYSE CONDÉ À ELSA DORLIN

Maryse Condé, née en Guadeloupe en 1937, est journaliste, professeure de littérature et écrivaine. Première présidente du Comité pour la mémoire de l’Esclavage, elle a construit depuis un demi-siècle une oeuvre riche qui décrit les « ravages du colonialisme et le chaos du post-colonialisme », parmi lesquels deux célèbres romans historiques, Ségou en 1984 et Moi, Tituba, sorcière… Noire de Salem en 1986.

Lauréate du Prix Nobel alternatif 2018, elle est lue dans de nombreuses pays et considérée comme l’une des plus grandes figures de la littérature contemporaine post- coloniale, mais aussi du black feminism. En effet, elle est largement étudiée aux prismes des pensées féministes intersectionnelles aujourd’hui, et notamment par Elsa Dorlin. Chercheuse en philosophie reconnue pour ses travaux en philosophie féministe, elle est l’autrice de nombreux ouvrages qui abordent les luttes féministes et décoloniales. Son texte Moi, Toi, Tituba…, au coeur de sa rencontre avec Dorothée Munyaneza, est issu d’un article sur Maryse Condé qu’elle écrit en 2022 pour les Yale French Studies.

DOROTHÉE MUNYANEZA

Dorothée Munyaneza est une chanteuse, danseuse, autrice et chorégraphe britannico-rwandaise basée à Marseille. Née en 1982 à Kigali, elle a 12 ans lorsque le génocide des Tutsis éclate et fuit aux côtés de sa famille en Angleterre. Elle y étudie les sciences sociales et la musique, s’établit en France où elle collabore avec de nombreux artistes dans les milieux de la musique, de la danse et du théâtre, parmi lesquels François Verret et Rachid Ouramdane. En 2013, elle fonde la compagnie Kadidi avec laquelle elle crée ses spectacles Samedi Détente en 2014, Unwanted en 2017 (invité par Sens Interdits en 2019) et Mailles en 2020. Avec la musique, le chant, la danse, le texte, Dorothée Munyaneza part du réel pour saisir la mémoire et le corps, porter les voix de celles et ceux qu’on tait, pour faire entendre les silences et voir les cicatrices de l’Histoire. Elle est actuellement artiste associée au Théâtre National de Chaillot, à la Maison de la danse et à la Biennale de la danse de Lyon.

© Elodie Paul


Mise en scène Dorothée Munyaneza Texte Elsa Dorlin

Avec Dorothée Munyaneza Musique originale Khyam Allimi, Dorothée Munyaneza Création costumes
Stéphanie Coudert Création & régie lumière Marine Levey Régie son Camille Frachet Régie générale Marion Piry

Production Cie Kadidi, Virginie Dupray Coproduction Tanz im August – HAU Hebbel am Ufer Berlin, Chaillot Théâtre National de la Danse, Maison de la Danse Lyon – Pôle Européen de création, DeSingel Anvers, Pavillon ADC Genève Avec le soutien de la Fondation Camargo, Cassis et de la DRAC Provence-Alpes-Côte d’Azur

Dorothée Munyaneza est artiste associée à Chaillot Théâtre National de la Danse, à la Fondation Carmargo et à la Maison de la danse Lyon.

Coréalisation Maison de la Danse et Théâtre du Point Jour